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Par Bruce Anderson, CAE

Si les associations ne changent pas pour mieux servir leurs utilisateurs finaux, ces clients trouveront peu à peu des solutions de rechange. Une fois ce virage enclenché, il est très difficile de réagir. 

 « Chaque acte de création est d’abord un acte de destruction. »  Picasso

Comme le suggère Picasso, l’innovation est un changement fondamental. Sa racine latine, novus, signifie nouveau. L’innovation commence par une nouvelle réflexion sur les moyens de faire les choses différemment. Toutefois, ce sont la mise en œuvre réussie du changement et la transformation qui en découle qui marquent une innovation efficace. L’innovation porte donc sur les nouveaux moyens de faire les choses.

Pourquoi l’innovation est-elle importante?

La créativité contribue à faire naître des idées; l’innovation amène ces idées vers des activités créatrices de valeur. Ce sont vos clients (vos membres et autres) qui déterminent la valeur. Ces activités sont nécessaires pour être plus efficace avec des ressources limitées, pour attirer et conserver les membres, et pour différencier votre organisation des autres. Songez à ceci :

« Le monde change à une vitesse folle. Le fort ne battra plus le petit. Dorénavant ce sera le rapide qui battra le lent. » Rupert Murdoch, président et chef de la direction, News Corporation

L’innovation vous aide à être plus agile. Le caractère innovateur fera la différence entre votre pertinence aujourd’hui, votre pertinence demain, et votre pertinence future.

Processus d’innovation

La génération d’idées et la créativité ne constituent qu’une partie de l’innovation. Le processus créatif porte sur la manière dont les idées prennent naissance.  L’évaluation et la mise en œuvre des idées sont tout aussi importantes. Le processus d’évaluation (Rogers, 1982), peut être adapté comme suit pour les associations.

STADES DE L’INNOVATION

PROCESSUS D’INNOVATION 

A. Initiation

1.Reconnaissance d’un problème ou d’un besoin, et évaluation par rapport à la stratégie de l’association.
2. Créativité – naissance d’idée(s).
3. Filtrage des idées et abandon des idées inappropriées.
4. Élaboration d’une solution d’innovation..

B. Evaluation

5. Évaluation financière et évaluation de la contribution à la stratégie de l’association.

C. Mise en oeuvre

6. Mise en œuvre de l’innovation.
7. Gestion du changement découlant de l’innovation

Il s’agit d’un processus général qui peut être modifié selon le type et la portée de l’application. Par exemple, le lancement d’un nouveau produit ou service peut aussi impliquer une recherche additionnelle et une composante de développement de marché. Cependant, l’innovation comportera toujours plusieurs stades clés : initiation, évaluation et mise en oeuvre.

Les obstacles à l’innovation

L’innovation n’apparaît pas dans toutes les organisations. Les associations érigent parfois des obstacles qui bloquent l’innovation. Voici quelques exemples d’obstacles à l’innovation.

OBSTACLE    

CE QUI PEUT ÊTRE FAIT

Une analyse excessive ralentit le changement

Donner au personnel l’autorité de prendre des décisions quant à un certain degré ou une certaine portée des problèmes.

Les gens craignent  de faire des erreurs

Encourager une culture de prise de risque; reconnaître les preneurs de risque, ne pas pénaliser les erreurs

Absence de priorité ou de temps pour l’innovation

Assigner une partie des tâches de chaque personne à la poursuite de l’innovation; évaluer chaque année l’habileté à innover.

Manque d’expertise

Permettre au personnel d’avoir accès à d’autres employés pour des séances rapides de suggestions afin de clarifier le problème et de créer des solutions possibles.

Manque de ressources pour les projets

Développer de petits bassins de fonds accessibles pour piloter des projets menant à l’innovation.

Problème trop volumineux 

Diviser le problème en portions plus petites et travailler sur une portion à la fois.

Le personnel ne possède pas les compétences requises

Le perfectionnement professionnel pourrait être axé sur les compétences en résolution de problème, la facilitation en petit groupe, le marketing (pour favoriser l’approche vis-à-vis de la clientèle), la gestion de projet et les techniques de génération d’idées.

Manque de vision partagée

Faire participer le personnel au processus de visualisation et l’aider à comprendre la vision.

Reconnaître et s’attaquer aux enjeux que cachent les obstacles aidera votre association à devenir un innovateur efficace.

Adapter le modèle de gestion actuel

Un modèle de gestion est la manière qu’emploie une organisation pour offrir une valeur à ses clients. À l’heure actuelle, beaucoup d’organismes sans but lucratif offrent des services par le biais du modèle d’adhésion, mais ce modèle limite de plus en plus leur croissance. Les associations doivent par conséquent trouver d’autres modèles de gestion afin de générer des revenus tant des non-membres que des membres (y compris de plus petits segments de membres). Des modèles de rechange pourraient inclure : différentes propositions de valeur (des moyens de combler les besoins des clients), de nouveaux partenariats, ou différents canaux de vente (p. ex. prestation de la formation par Internet au lieu de la formation sur place). La section « L’innovation dans l’action » donne l’exemple d’un processus innovateur qu’une association a employé pour générer des revenus des membres et des non-membres.

L’innovation dans l’action

Que fait une organisation contrainte sur le plan géographique pour augmenter rapidement ses revenus et éviter qu’ils ne tombent entre les mains d’autres organisations? La CAA Saskatchewan (une division provinciale de l’Association canadienne de l’automobile) s’est trouvée dans cette situation. Il fallait agir après que les événements du 11 septembre 2001 et les programmes d’assistance routière des fabricants de véhicules neufs aient fait perdre 1 million de dollars aux résultats nets de la CAA Saskatchewan. En raison d’une contrainte empêchant les programmes de marque CAA d’être vendus dans d’autres juridictions de clubs automobiles et avec le deuxième taux de pénétration du marché le plus élevé en Amérique du Nord (51 % par rapport à la moyenne canadienne de 32 %), la CAA Saskatchewan s’est tournée vers son bassin de membres et a développé de nouveaux produits (Anderson et Rouse, 2011).  L’association a lancé le premier programme nord-américain de réparation de véhicules et de ventes de véhicules d’occasion, a créé une ligne commerciale d’assurance individuelle contre les accidents, a fait l’acquisition d’une compagnie d’autobus en faillite (qui détient maintenant 40 % du marché des autocars), et a commencé à vendre ces services dans d’autres provinces. Au cours des dix dernières années, les revenus de la CAA Saskatchewan ont triplé, et avec d’autres innovations à venir, l’organisation prévoit tripler encore sa croissance au cours des dix prochaines années.

RÉFLEXION NOVATRICE

Favoriser l’innovation

Pour améliorer l’ensemble du talent innovateur, l’organisation doit gérer sa culture et son processus stratégique. Gérer la stratégie signifie de savoir ce qui doit être fait, et comment. Cela signifie aussi de faire participer les gens, à tous les niveaux, au développement et à la mise en œuvre de la stratégie. Une culture participative incite les gens à s’impliquer dans la stratégie. Dans une culture positive et de soutien, on encourage l’expérimentation.

TECHNIQUE POUR INCITER LA RÉFLEXION NOVATRICE

La synétique fait référence à une technique de remue-méninges en groupe, axée sur des tâches spécifiques et utilisée pour soutenir les efforts de résolution de problème. Elle fait appel aux étapes suivantes (Potter, 2005) :

a) Un détenteur de problème (la personne responsable de résoudre le problème) énonce au groupe sa vision du problème.
b) Le groupe fait une séance de remue-méninges sur des définitions possibles ou des énoncés de rechange du problème.
c) Le détenteur du problème choisit quelques définitions du problème pour les étudier plus à fond.
d) Au moins une définition plus poussée du problème est ramenée au groupe, qui fait une séance de remue-méninges sur les solutions possibles.
e) Le détenteur du problème choisit parmi les solutions possibles à des fins d’analyse ou d’étude, ou utilise à nouveau le groupe pour élaborer encore plus les solutions.

On peut également encourager l’innovation grâce à diverses autres techniques. Un processus utile consiste à rechercher des modèles ou des pratiques exemplaires à l’extérieur du secteur sans but lucratif, car les études ont démontré que la plus grande partie de l’innovation dans un secteur provient de l’extérieur de l’industrie de l’organisation.  Une hypothèse (p. ex., une association présume qu’aucun membre ne paiera pour le contenu d’un site web) est souvent contraignante, de sorte qu’il faudrait défier toutes limites.Modifier les relations et l’environnement interne (p. ex., réunir le personnel de la comptabilité et de la programmation pour un projet spécial) peut fournir un regard nouveau sur des situations existantes. Modifier les contextes de travail ou la manière d’effectuer le travail peut également susciter une pensée nouvelle. En bref, on peut encourager l’innovation en modifiant les règles, en regardant à l’extérieur de l’organisation ou en modifiant l’approche face aux problèmes.

CONSEILS D’INNOVATION

  • Mettez en place une boîte de courriels de suggestions. Un prix ou un partage des gains pourrait être attribué aux meilleures suggestions
  • Formez les superviseurs pour qu’ils écoutent et évitent de porter un jugement.
  • Soyez ouvert face au problème et demandez de l’aide.
  • Évitez de pénaliser/humilier les gens pour leurs erreurs.

L’innovation dans divers rôles de l’association

L’innovation nécessite une approche d’équipe. Dans bien des cas, une personne à elle seul ne suffit pas pour initier l’innovation. Les rôles des membres de l’équipe comprennent : les créateurs d’idées, les défenseurs d’idées, les évaluateurs d’idées, et les formulateurs d’idées. Il existe aussi d’autres rôles :

L’innovateur de l’association
Chaque innovation nécessite au moins un défenseur d’idées pour amorcer et défendre cette idée. Ils sont axés sur les objectifs et sont créatifs dans leur poursuite de l’innovation. Toute personne dans une association peut être un créateur ou un défenseur d’idées.

Le collègue
Les collègues solidaires se rallient derrière les idées mais donnent aussi des rétroactions constructives aux créateurs et aux défenseurs d’idées. Les collègues peuvent également identifier ou raffiner le problème, en présentant souvent leurs problèmes spécifiques au groupe pour des suggestions et des réflexions.

Le gestionnaire et (ou) représentant en chef du personnel (RCP)
Aucune innovation ne surviendra sans un gestionnaire solidaire, un gestionnaire qui reconnaît la valeur de l’innovation et encourage les comportements correspondant à une culture d’innovation. Les occasions d’innovation se créent en donnant du temps et en assignant des ressources aux idées, et en encourageant du travail d’équipe temporaire pour poursuivre les idées. L’appui du personnel peut s’exprimer par des messages tels que : « Je vais appuyer l’idée si elle est pertinente et correspond à notre vision et stratégie ». Le RCP devient ainsi l’interprète et le protecteur de la vision pour le personnel de l’association.

Le rôle le plus important du RCP est peut-être celui de formateur et de facilitateur. Le gestionnaire astucieux fera bouger les gens afin de créer de nouvelles perspectives et de soutenir un environnement menant à davantage de flexibilité et à moins de rigidité. Dans cet environnement, le personnel posera davantage de questions et on devrait lui enseigner à mettre correctement au défi la manière de faire les choses.

Tandis que certaines personnes ont le don de créer des concepts et des idées, toute personne peut être innovatrice. L’innovation nécessite cependant des comportements solidaires des collègues et des leaders.

L’extrait précédent est tiré de « Canadian Association Management », 2e édition, la source ultime d’information sur le leadership, les développements les plus récents et les pratiques exemplaires dans le secteur sans but lucratif, publié par, et disponible à la Société canadienne des directeurs d’association (www.csae.com).